dimanche 15 novembre 2009

The Great FireWall, GFW

(Nota : Je reproduis ici un billet publié sur mon site consacré à la langue chinoise, Sinoiseries).
En cherchant sur les réseaux un moyen de contourner la censure du Pouêt-Cot-Cot pour pouvoir lire tranquillement les informations taiwanaises et accéder à mon compte sur Blogger pour mettre à jour mon blog Pascal-en-Asie, je découvre un peu de vocabulaire, qui ne vous servira pas à grand-chose pour ce qui est d’accéder à la liberté électronique, mais qui au moins vous permettra de comprendre un peu mieux à quelle sauce les nternautes chinois, qu’ils soient autochtones ou importés, sont cuisinés...
Un petit mot tout d’abord sur le titre du présent billet. GFW signifie ici, non pas « girl-friend Wendy » (« ma copine Wendy », sigle fantaisiste), ni « Global Fund for Women » (Fonds mondial pour les femmes, vrai sigle), comme pourraient le croire quelques esprits torturés, mais 防火长城 fánghuǒ chángchéng, ou, en anglais dans le texte, « Great FireWall » (d’où le sigle), que l’on pourrait cavalièrement traduire en français « grande muraille pare-feu ». On a là une illustration d’un de ces jeux de mots à la sauce aigre dont raffolent les Chinois. Je m’explique...
En Chine, on traduit le mot « firewall », ou « pare-feu » en français, par le mot trisyllabique 防火墙 fánghuǒqiáng (littéralement : mur 墙 qui protège 防 du feu 火).
Pour ceux dont les notions d’informatique seraient aussi floues que les miennes, j’ai pris de la peine de recopier ici la définition du mot « pare-feu » sur Wikipedia :

Un pare-feu (firewall en anglais), dans le contexte du réseau informatique est une métaphore utilisée pour désigner un logiciel et/ou matériel, qui a pour fonction de faire respecter la politique de sécurité du réseau, celle-ci définissant quels sont les types de communication autorisés ou interdits.

Cette grande-muraille pare-feu est le très officiel organisme chinois, pudiquement appelé « 中国国家网络防火墙 » (zhōngguó guójiā wǎngluò fánghuǒqiáng, littéralement « mur pare-feu pour les réseaux national chinois »), chargé de protéger les pures âmes de la nation chinoise contre les très perfides sites (essentiellement occidentaux, voudraient faire croire les autorités chinoises) qui ont, comme il fallait s’y attendre, ourdi un sombre complot visant à renverser la dictature démocratique du grandiose (伟大 wěidà) et infaillible (正确 zhèngquè, qui signifie plutôt « exact » qu’infaillible) Parti Communiste Chinois (PCC, appelé aussi Pouêt-Cot-Cot par certains impertinents) et à priver la très grande Chine et son très grand peuple de la place de choix qui leur revient dans le monde, aux moyens principalement de la désinformation et de la pornographie. Et ce « mur » est tellement puissant que, par malice, on l’a qualifié non pas de « mur » (« wall » : 墙 qiáng), mais de « grande muraille » (« great wall » disent nos amis anglo-saxons, 长城 chángchéng en chinois). L’image est d’ailleurs assez bien trouvée, puisque la mission première de la Grande Muraille était de protéger l’Empire du Milieu contre les invasions barbares !

À partir de ce néologisme, on a construit des expressions plus ou moins imagées. On dit par exemple, lorsque l’on cherche un moyen de contourner la censure, que l’on veut « faire le mur » (翻墙 fānqiáng) ; certains internautes chinois, qui mériteraient à n’en pas douter l’emprisonnement dans l’une de ces prisons secrètes (dont on a parlé récemment dans ces médias occidentaux qui orchestrent la désinformation systématique contre la Chine) qui d’ailleurs n’existent pas (nous disent les autorités idoines), osent même appeler à « abattre » ou à « renverser » (推倒 tuīdǎo) ce mur.

Mais gageons que le gouvernement chinois, guidé par le grandiose et infaillible Pouêt-Cot-Cot, continuera à oeuvrer pour protéger ses administrés contre les néfastes influences de la civilisation occidentale décadente. Écrions-nous donc ensemble : 中国共产党万岁! (zhōngguó gòngchǎndǎng wànsuì : Vive le Parti Communiste Chinois !, 万岁 wànsuì, littéralement « dix mille ans », étant le voeu d’immortalité que l’on adressait dans le passé à l’Empereur féodal, tout aussi grandiose et infaillible que le Pouêt-Cot-Cot, je vous laisse cogiter sur l'analogie).

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